Piles électrochimiques et électrolyse
1 Oxydant et réducteur conjugués - Couple rédox
Soit la réaction spontanée:
CuCl2 + Fe = Cu + FeCl2
ou, en solution aqueuse:
Cu++ + 2 Cl- + Fe = Cu + Fe++ + 2 Cl-
Cu++ y est oxydant puisqu'il prend des électrons à Fe:
Cu++ + 2 e- = Cu
Mais dans la réaction spontanée:
Cu + 2 AgNO3 = 2 Ag + Cu(NO3)2
ou, en solution aqueuse:
Cu + 2 Ag+ + 2 NO3- = 2 Ag + Cu++ + 2 NO3-
Cu y est réducteur puisqu'il donne des électrons à Ag+:
Cu = Cu++ + 2 e-
De façon plus générale, la réaction Cu++ + 2 e- = Cu peut donc se passer dans les deux sens, soit dans le sens de la réduction de l'oxydant (de la gauche vers la droite), soit dans le sens de l'oxydation du réducteur (de la droite vers la gauche).
On dit que Cu est le réducteur conjugué à l'oxydant Cu++ et que Cu++ est l'oxydant conjugué au réducteur Cu. L'ensemble oxydant et réducteur conjugués est appelé couple oxydo-réducteur ou couple rédox. Par convention, on note toujours d'abord l'oxydant puis le réducteur de tout couple rédox sous la forme:
Cu++ /Cu |
Dans les exemples précédents, on observe, dans chaque réaction d'oxydo-réduction, deux couples rédox, soit:
Dans chacune de ces réactions, l'oxydant d'un couple oxyde le réducteur de l'autre couple, et le réducteur conjugué du premier couple réduit l'oxydant conjugué du second couple:
oxydant 1 + réducteur 2 = oxydant (conjugué) 2 + réducteur (conjugué) 1
2 Conduction d'électricité
2.1 Conduction d'électricité dans un métal
On sait que les métaux, comme par exemple le cuivre ou l'aluminium, sont de bons conducteurs d'électricité. Un métal est un empilement régulier d'atomes dont les électrons périphériques ne sont pas liés aux noyaux, mais sont libres de passer d'un atome à l'autre. Lorsqu'on relie un métal aux deux bornes d'un générateur électrique, les électrons se déplacent de la borne négative, car productrice d'électrons, vers la borne positive absorbant les électrons. Le courant électronique dans un conducteur métallique est donc un flux d'électrons, les noyaux atomiques restant en place. Chaque électron, propulsé par celui qui le suit, pousse celui qui le précède. Dès lors, si un circuit électrique est constitué d'un fil de cuivre soudé à un fil d'aluminium, on ne retrouve ni atome d'aluminium dans le cuivre, ni atome de cuivre dans l'aluminium. En résumé, le courant électronique dans les métaux ne s'accompagne d'aucun transport de matière.
On distingue essentiellement et très simplement trois variables qui caractérisent et influent ce courant électrique ou déplacement d'électrons:
2.2 Conduction d'électricité dans une solution
Si l'on relie les deux bornes d'un générateur électrique à deux électrodes de carbone plongées dans du chlorure de sodium NaCl solide, aucun courant électrique ne passe, comme peut en témoigner un ampèremètre placé sur le circuit électrique, qui ne mesure aucun courant électrique: le chlorure de sodium solide ne conduit pas l'électricité. Mais si l'on chauffe NaCl jusqu'à la fusion, l'aiguille de l'ampèremètre indique qu'un courant électrique parcourt le circuit: le chlorure de sodium fondu conduit l'électricité.
Par ailleurs, si les deux électrodes sont plongées dans l'eau pure, aucun courant ne passe car l'eau pure n'est pas conductrice d'électricité. Mais si l'on y dissout un peu de chlorure de sodium, la solution aqueuse de NaCl est conductrice et un courant électrique circule.
Dans le cas du sel fondu comme dans le cas du sel dissous, le passage de courant électrique ne peut s'expliquer que par le déplacement de particules chargées électriquement: les ions positifs et négatifs, Na+ et Cl-. Dans les sels fondus ou dissous, le courant électrique est fait d'un flux d'ions: des cations (= ions positifs) vont vers la cathode (= borne négative) et des anions (= ions négatifs) vont vers l'anode (= borne positive). Contrairement à ce qui se passe dans les métaux, le courant électrique y résulte donc de deux migrations de particules lourdes et chargées électriquement.
3 La pile électrochimique
3.1 Construction d'une pile électrochimique
Soient deux béchers, l'un contenant une solution 1M de sulfate de fer FeSO4 dans laquelle plonge une plaque de fer, l'autre contenant une solution 1M de sulfate de cuivre CuSO4 dans laquelle plonge une plaque de cuivre. Les deux plaques métalliques sont reliées par un fil électrique sur lequel est placé un voltmètre, appareil mesurant les tensions électriques. Tel quel, le voltmètre ne détecte aucun potentiel, aucun courant électrique ne pouvant circuler, car le circuit électrique n'est pas fermé. Mais si l'on relie les deux solutions par un pont électrolytique fait d'un gel (solution gélifiée, grâce à l'agar, pour qu'elle ne coule pas) d'une solution de KNO3 (le nitrate de potassium est un électrolyte, c'est-à-dire une substance dissociée dans l'eau en ions positifs K+ et négatifs NO3-), le voltmètre détecte une tension électrique de +0,75 V si sa borne négative est reliée au fer et sa borne positive au cuivre.
Le pont électrolytique servant à fermer le circuit électrique, c'est-à-dire à permettre au courant électrique de rejoindre, après circulation, son lieu de production, les électrons vont de la plaque de fer à la plaque de cuivre en faisant dévier le voltmètre. Avec le temps, on constate aussi que la masse de la plaque de fer diminue et alors que la concentration d'ions Fe++ en solution augmente, et qu'en même temps la masse de la plaque de cuivre augmente alors que la concentration d'ions Cu++ en solution diminue.
Plus précisément, il se passe la réaction d'oxydo-réduction:
Fe + Cu++ + SO42- = Cu + Fe++ + SO42-
Dans le bécher de gauche, le fer métallique est oxydé, par perte d'électrons, en ions ferreux Fe++:
Fe = Fe++ + 2e-
En même temps, dans le bécher de droite, les ions cuivre Cu++ sont réduits, par gain d'électrons, en cuivre métallique:
Cu++ + 2e- = Cu
Les électrons produits par l'oxydation du fer et indispensables à la réduction du cuivre, migrent d'un bécher à l'autre en empruntant le fil électrique: un courant électrique est ainsi produit. Mais, alors que dans chaque bécher, avant réaction, les concentrations en ions métalliques positifs et ions sulfates négatifs étaient égales, à mesure que la réaction d'oxydo-réduction se poursuit et que la pile débite du courant, la concentration en ions ferreux dépasse celle d'ions sulfates dans le bécher de gauche, ce qui tend à rendre la solution positive, alors que la concentration en ions cuivre diminue par rapport à celle d'ions sulfates dans le bécher de droite, ce qui tend à rendre la solution négative. Pour maintenir l'électroneutralité des solutions, l'indispensable pont électrolytique permet à ses ions négatifs (NO3-) de migrer vers la solution de sulfate de fer, et à ses ions positifs (K+) de migrer vers la solution de sulfate de cuivre. Il y a donc simultanément un courant d'électrons dans le fil électrique, et un courant ionique compensatoire dans le pont électrolytique. Notons que ce courant ionique pourrait aussi s'effectuer au travers d'un paroi poreuse séparant les deux solutions, la paroi freinant le mélange des deux solutions par diffusion.
3.2 Origine de la différence de potentiel
Si l'on mesure une tension, une différence de potentiel entre les plaques de fer et de cuivre, c'est que les deux couples rédox Cu++ /Cu et Fe++ /Fe ne sont pas au même potentiel, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas la même tendance à être réduit ou oxydé. C'est de cette différence que naît le transfert d'électrons et donc le courant électrique. En d'autres termes, si les réactions d'oxydation Fe = Fe++ + 2e- et de réduction Cu++ + 2e- = Cu ont lieu dans ce sens, c'est que l'oxydant Cu++ du couple Cu++ /Cu a plus tendance à pendre des électrons et à être réduit que l'oxydant Fe++ du couple Fe++ /Fe. On dit que le potentiel standard de réduction du couple Cu++ /Cu est plus élevé que le potentiel standard de réduction du couple Fe++ /Fe. Et si le couple Cu++ /Cu impose, par son potentiel de réduction plus élevé, sons sens de réduction, il oblige le couple Fe++ /Fe à réagir dans le sens de l'oxydation.
Comme les oxydants des différents couples rédox n'ont pas la même tendance à prendre des électrons, il est utile de classer les couples rédox selon cette "puissance de réduction" décroissante de l'oxydant des différents couples. Pour ce faire, on a déterminé expérimentalement les différences de potentiel que les différents couples rédox produisent chacun au contact du couple de référence H+ /H2. Cette différence de potentiel mesurée dans des conditions standardisées (température et pression standard et concentration des solutions de 1M) est appelée, pour chaque couple, son potentiel standard de réduction à l'hydrogène = E0 H+/H2. Ce potentiel sera positif si le couple réagit dans le sens de la réduction au contact du couple H+ /H2, ou ce potentiel sera négatif si le couple réagit dans le sens de l'oxydation au contact du couple H+ /H2. En d'autres termes, plus le potentiel standard de réduction à l'hydrogène est élevé, plus l'oxydant du couple est un puissant oxydant et son réducteur conjugué un faible réducteur; et plus le potentiel standard de réduction à l'hydrogène est faible, plus l'oxydant du couple est un oxydant faible et son réducteur conjugué un réducteur puissant. Il est logique qu'au sein d'un couple rédox donné, plus l'oxydant est puissant, plus le réducteur conjugué est faible et vice versa.
3.3 Calcul de la différence de potentiel d'une pile
Pour déterminer la tension qu'une pile peut fournir dans les conditions standard, il suffit de soustraire les potentiels standard de réduction des deux couples, valeurs que l'on peut consulter dans les livres de chimie et les tableaux périodiques. Cette valeur DE peut être assimilée à la force électromotrice de la pile.
Dans l'exemple précédent (point 3.1), DE = E0 (Cu++ /Cu) - E0 (Fe++ /Fe) = 0,34 V- (-0,41 V) = 0,75 V
Nature du couple rédox |
E0 H+/H2 |
F2/F- |
2,87 V |
Au3+/Au |
1,50 V |
Cl2/Cl- |
1,36 V |
Hg2+/Hg |
0,85 |
Ag+/Ag |
0,80 V |
Fe3+/Fe2+ |
0,77 V |
Cu2+/Cu |
0,34 V |
H+/H2 |
0,00 V |
Fe3+/Fe |
-0,04 V |
Pb2+/Pb |
-0,13 V |
Ni2+/Ni |
-0,23 V |
Cd2+/Cd |
-0,40 V |
Fe2+/Fe |
-0,41 V |
Zn2+/Zn |
-0,76 V |
Al3+/Al |
-1,71 V |
Mg2+/Mg |
-2,38 V |
Ca2+/Ca |
-2,76 V |
K+/K |
-2,92 V |
Li+/Li |
-3,05 V |
Exemple succinct de table des potentiels standard de réduction à l'hydrogène.
3.4 Usure de la pile
Dans l'exemple précédent, nous savons qu'à mesure que la pile débite du courant, le fer métallique se transforme en ions ferreux en même temps que les ions Cu++ deviennent du cuivre métallique. Autrement dit, dans l'équation d'oxydo-réduction...
Fe + Cu++ + SO42- = Cu + Fe++ + SO42-
...les deux réactifs disparaissent progressivement tandis que les deux produits formés apparaissent. Il s'ensuit un ralentissement de la réaction et une diminution progressive de la tension électrique et donc du courant électronique débité par la pile.
L'équation de NERNST permet de calculer, à température standard, le potentiel de réduction d'un couple en fonction des concentrations de ses formes oxydante et réductrice:
E = E0 + 0,059/n . log (conc.oxydant/conc.réducteur) |
où "n" représente le nombre d'électrons mis en jeu dans l'équation de réduction. Soit, dans notre exemple:
E (Cu++ /Cu) = 0,34 V + 0,059/2 . log (conc.Cu++)
E (Fe++ /Fe) = -0,41 V + 0,059/2 . log (conc.Fe++)
Or, on sait qu'à tout moment:
DE = E0 (Cu++ /Cu) - E0 (Fe++ /Fe)
donc
DE = (0,34 V + 0,059/2 . log (conc.Cu++)) - (-0,41 V + 0,059/2 . log (conc.Fe++))
DE = 0,75 V + 0,059/2 . log (conc.Cu++) - 0,059/2 . log (conc.Fe++)
DE = 0,75 V + 0,059/2 . log (conc.Cu++/conc.Fe++)
On comprend que, à mesure que les ions Cu++ disparaissent et que les ions Fe++ apparaissent, la pile débite de moins en moins de courant car sa tension diminue jusqu'à s'annuler lorsque la pile est "plate".
Variation de la différence de potentiel DE générée par la pile en fonction de l'avancement de la réaction d'oxydo-réduction, c'est-à-dire de l'épuisement des réactifs et de l'apparition des produits.
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